Lu : Obsolescence : An Architectural History par Daniel M. Abramson publié aux University of Chicago Press en 2016, et les articles Aspen Root Passive Home publié dans Wood Design & Building (hiver 2016-2017) et Aspen Root Passive House publié dans SABMag sous la plume d’Henry Tufts.
D’emblée, Abramson pique notre curiosité : « Much has been written about the idea of impermanence in architecture in relation to portability and adaptability; decay, weathering, and warfare; and ephemerality and the unfinished. […] But not until the twentieth century did obsolescence come to be understood as a general condition of change in architecture and cities as a whole – a relentless, universal, impersonal process of devaluation and discard. » (p. 5) À titre d’exemple, l’auteur raconte comment le Gillender Building fut construit à New York en 1897, sur un terrain de seulement 8 x 22 mètres (!), pour être démoli dès 1910 sous prétexte que l’édifice avait atteint la fin de sa durée de vie commerciale, incapable de rapporter suffisamment de revenus comparativement à la valeur du terrain où il était situé.

L’auteur explique ensuite comment l’instauration d’une approche à si courte vue va être systématisée par trois phénomènes : tout d’abord, le gouvernement américain alloue à partir des années 1910 d’importantes déductions d’impôt aux compagnies privées pour la dépréciation des édifices dont elles sont propriétaires. Puis, des traités comme Building for Profit : Principles Governing the Economic Improvement of Real Estate de Reginald Pelham Bolton (1856-1942), publié en 1911, présentent la construction en termes purement comptables à l’aide de tableaux comparant la durée de vie des bâtiments selon leur usage et leurs matériaux. Finalement, à la suite de l’augmentation des impôts pour éponger le coût de la Première Guerre mondiale, la puissante National Association of Building Owners and Managers (NABOM) convainc Washington, dans le contexte de démolition et de reconstruction massive qui prévaut à Chicago dans les années 1920, que vingt-huit ans correspond à « the useful and profitable life of an office building during which it is earning an adequate return on the investment » (p. 23). D’où la durée de vie consacrée de vingt-cinq ans, en apparence objective et dénuée de tout facteur humain, encore utilisée aujourd’hui en gestion immobilière.

Abramson tente bien d’envisager les bâtiments modernistes conçus comme des hangars pour un maximum de flexibilité, les mégastructures « évolutives » auxquelles des modules peuvent être greffés, le brutalisme, la redécouverte de l’architecture vernaculaire, la conservation du patrimoine, le recyclage, le postmodernisme et le développement durable comme différentes tentatives de répondre aux conséquences néfastes de l’obsolescence planifiée. Il est cependant un peu étonnant de le voir constamment réduire cette dernière à la seule dimension fonctionnelle, au fait que l’aménagement d’un édifice risque, au fil du temps, d’être moins adapté à l’évolution des activités qui se déroulent sous son toit. La démonstration s’avère donc intrigante, mais pas tout à fait satisfaisante ou convaincante.

Une consolation toutefois : Abramson ose relever certaines contradictions inhérentes au développement durable en architecture. Il souligne ainsi le fait que toujours plus de technologie est appelée en renfort pour résoudre des problèmes engendrés par la technologie, que l’obsession pour l’évaluation de la performance relègue au second rang les aspects politiques et les impacts environnementaux de cette nouvelle industrie, et que le discours voisine souvent la foi aveugle et l’intransigeance des convertis.
Comme cette maison privée construite à quatre-vingts kilomètres au nord de Winnipeg, apparemment chauffée uniquement passivement, mais avec sa batterie de gadgets fragiles et sa dépendance envers un système mécanique pour assurer l’apport d’air frais. À quand une véritable remise en question de la « respiration exacte » de Le Corbusier pour enfin établir une relation plus équilibrée avec la nature ?
