Pression

Lu : Les tranchées : maternité, ambiguïté et féminisme en fragments par Fanny Britt publié dans la série Documents chez Atelier 10 en 2013; Les retranchées : Échecs et ravissements de la famille en milieu de course par Fanny Britt publié dans la série Documents chez Atelier 10 en 2019; et For the Love of Men: A New Vision for Mindful Masculinity par Lisa Plank publié chez St. Martin’s Press en 2019.

Comme l’énumère Plank : « […] motherhood, racialized beauty ideals, having the perfect slim yet large-breasted body, always being pleasant and smiling for others » (p. 78), les attentes envers les femmes sont infinies… et souvent marquées par la double contrainte. Comme le souligne Britt : « Il faut [pendant la grossesse] aimer son ventre, il faut le montrer (et ensuite s’assurer de le perdre le plus vite possible) […] parce que le bombardement d’images qui définissent le succès, la beauté, l’idéal finit bien par se fossiliser en nous et que la pression se fait nôtre, la pression s’intériorise, nous devenons la pression. » (Les tranchées, p. 23 et 45)

Photo : Marilyn Monroe, 24, in Griffith Park, Los Angeles, 1950, Ed Clark, source.

Et que dire du double standard…

Photo : Frida Kahlo and Diego Rivera meeting with Anson Conger Goodyear, President of the Museum of Modern Art, in New York, 13 novembre 1931, photographe non identifié, source.

D’après Plank : « Almost all of the top-ten highest-grossing films of 2017 had a white male protagonist who uses violence as a means of self-expression » (p. 15). Cela suggérerait : « […] that your masculinity can be taken away at any time (by other men) and that carrying a violent weapon that kills people is a surefire way to get it back » (p. 13). Citant une entrevue avec la philosophe Judith Butler, Plank précise : « Killing is an act of saying, ‘I am the one who decides who lives and dies.’ So killing establishes the killer as sovereign in the moment that he kills, and that is the most toxic form of masculinity can take » (p. 47).

Photo : Trinity (Carrie-Anne Moss) dans The Matrix, 1999, Lana et Lilly Wachowski (réalisatrices), source.

Cherchant à comprendre cette hypermasculinité toxique, Plank cerne le rôle étroit attendu des hommes : être (hyper) confiant, parler plutôt qu’écouter, ne jamais se montrer vulnérable, demander de l’aide ou admettre s’être trompé, rester stoïque devant l’adversité, ne pas exprimer d’empathie, ni faire preuve de tendresse, collectionner les conquêtes sexuelles (plutôt que d’apprivoiser l’intimidante intimité), pourvoir (« Male currency is how much they bring back home ») et, surtout, ne pas danser. Intelligence émotionnelle : connaît pas. Non, pour être homme, un vrai, il faut dominer (anéantir ?)… en arrivant au gala au volant d’une Ferrari 458 « camo », car quoi de mieux que le mode « paon » pour capter le regard de Bella ?

Cependant, comme le demande Britt : « Quels modèles marginaux, prêts à laisser tomber les idées usées et ronflantes sur ce qu’un homme devrait être et ne pas être, leur tendent les bras [aux garçons] ? » (Les retranchées, p. 79)

Photo : Silvana Mangano (ITA), actress, at the Museum of Modern Art, New York City, 1956, Eve Arnold, source.

On dit qu’une cuisine en « L » ne peut être qu’une « cuisine de gars » [comprendre conçue par un architecte qui n’a pas pensé au coin peu accessible sous la croisée des comptoirs]. Pourtant : « […] some men might want to live more equitable lives and blur the lines of gendered expectations within their relationships, but the women they are in partnerships with might not always be interested. » (p. 154)

Photo : Swimsuit Peeck and Peeck, à la une du Vogue USA, 1er juillet 1940, Toni Frissell, source.

Aussi : « ‘Real power doesn’t come from coercion. It comes through deep understanding, compassionate leadership and having a way to express a level of morality and ethics that makes you bigger than just a man ‘ » (Plank citant Victor Pineda, p. 89).

Voilà un beau projet, les gars, exigeant certes, mais offrant une pression plus libératrice. À méditer dans votre hamac cet été !

Peinture : The Red Hammock, date inconnue, Sir John Lavery, source.