Vertige

Vu : It Will Never Work: 25 Years of Urban Splash 1993-2018, rétrospective des projets réalisés par le promoteur Urban Splash présentée au RIBA North (Liverpool) en mai et juin 2018.

Malgré la pauvreté encore bien présente dans nos rues, Saint-Sô est en passe de devenir le quartier le plus « hip » de la capitale. Plus largement, la province se porterait bien économiquement parlant elle aussi (depuis le début de l’année 2018, le taux de chômage au Québec s’établit en moyenne à 5,5 %). Serait-ce ce qui explique l’élan irrésistible que ressentent certains vers le ciel ?

À Sainte-Foy, c’est 755 M$ que le Groupe Dallaire souhaite investir dans Le Phare, ce nouveau « quartier vertical complet » dont la tour principale s’élèverait à 65 étages (plus du double du Complexe G). À Gatineau, Brigil projetait la construction de deux tours (35 et 55 étages) derrière le Musée canadien de l’histoire jusqu’à ce que le conseil municipal vote finalement contre ce projet de plus 400 M$ à la fin du mois d’août 2018.

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Illustration : Le Phare, juin 2018, Gensler et Alpha Architecture pour le Groupe Dallaire, source.
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Illustration : 61 et 77 rue Laurier, Gatineau, 2015, Neuf architect(e)s pour Brigil, source.

Pourquoi des tours si hautes et une telle concentration de fonctions sous un même toit dans un contexte urbain si bas et épars ? Quelles études de marché démontrent l’existence d’une demande à ce point phénoménale que des projets aussi colossaux sont requis à ces deux endroits précis ? Sainte-Foy n’est pas Hong Kong et Gatineau n’est pas Chicago. Du moins, pas encore.

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Photo : Architecture of Density No. 115, Hong Kong, China, 2009, Michael Wolf in Elias Redstone (2014). Shooting Space: Architecture in Contemporary Photography, Phaidon, p. 66.
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Photo : Marina City, Chicago, 2001, Hiroshi Sugimoto, in Elias Redstone (2014). Shooting Space: Architecture in Contemporary Photography, Phaidon, p. 154.

Il est souvent reproché aux écolos, aux ténors du patrimoine, ainsi qu’aux « pas-dans-ma-cour » de s’opposer au développement et à la « création de valeur ». Maintenant que les Québécois ne sont plus « nés pour un petit pain », il faudrait : « Think big, sti ! », comme le proclamait Elvis Gratton.

Alors qu’il y a tant de lieux dans la ville qui pourraient être mis en valeur, habités, densifiés et avec lesquels de nouvelles relations restent à imaginer, pourquoi ne pas voir grand en dirigeant là les investissements et la créativité ? Pour trouver des compromis qui permettraient de conserver le meilleur de l’existant tout en insufflant le je ne sais quoi qui donne envie de s’y poser.

Il y a 25 ans à Manchester naissait Urban Splash. Choisissant des bâtiments existants, souvent d’anciens mastodontes industriels ou des ensembles brutalistes situés dans des quartiers difficiles, ce promoteur s’allie depuis ses débuts avec les meilleurs talents dans toutes les disciplines pour relancer de façon originale et viable des endroits autrement voués à l’abandon ou à la démolition.

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Photo : Lister Mills, Bradford, 2006, Urban Splash avec David Morley Architects, photographe non identifié, source.
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Photo : Park Hill, Sheffield, sans date, Urban Splash avec Hawkins-Brown Architects et Studio Egret West, photographe non identifié, source.

Comme l’explique la directrice du marketing dans un des panneaux de l’exposition, Orla McGrath (nous soulignons) :

« We have always understood that good ideas and great architectural design are not enough – without knowing how to communicate, without humour, provocation, persuasion and the odd spectacle even the best ideas can end up gathering dust. From the beginning we needed to find new ways of saying new things – we had to change options and transform perceptions – pioneering communications for pioneering projects.

It’s not just about sales, we try to build a community of people around every new challenge: partners, enthusiasts, advocates, creatives as well as buyers and tenants. Every place needs a positive story to tell and for us that story starts in the place itself,  it is often an unfamiliar story about a place with bad press, first we need to believe it and then others will too. We enthusiastically promote the ideas, the projects and the places and through this we aim to build a strong brand.

Most importantly we have to mean what we say. We have talked a good talk for twenty-five years, but it only rings true if we walked the walk. »

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Photo : Slaughterhouse, Plymouth, sans date, Urban Splash avec Gillespie Yunnie Architects, photographe non identifié, source.