Elles

Vu : ELLES PHOTOGRAPHES présentée au Musée des beaux-arts de Montréal jusqu’au 19 février 2017.

Toutes réalisées par des photographes canadiennes et américaines, les images présentées montrent une grande variété d’approches. Par contre, ce sont les mêmes quelques thèmes souvent associés aux préoccupations dites féminines qui prédominent, soit le corps, l’intime, le domestique. Simple reflet de la place traditionnellement réservée aux femmes dans la société, échantillon représentatif de la production contemporaine ou choix délibéré des commissaires ? Aucune de ces photographes ne va en tout cas à la rencontre du paysage, de la place publique, de la politique, de la guerre ou de l’histoire, ou si peu, ce qui est tout de même surprenant lorsque l’on sait qu’elles sont nombreuses dans le feu de l’action.

Les murs peints couleur chair et l’emplacement de l’exposition, dans la salle faiblement éclairée et tout en courants d’air qui jouxte le corridor souterrain reliant les pavillons Desmarais et Hornstein, donne par ailleurs l’impression que le travail des femmes ne mérite peut-être pas encore toute la place qui lui revient au musée. Pourtant, cette exposition vise manifestement à célébrer leur art.

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Photo : Joana de dos dans l’encadrement de la porte, Châteauneuf-de-Gardagne, Avignon, 2000, Nan Goldin, source.

En 1972, Francine Chabot-Ferland écrivait : « Toutes les revues nous invitent à dresser une liste de nos atouts pour mieux les mettre en valeur. Nous passons des heures devant le miroir pour savoir si nous avons le visage rond ou carré, si nos seins sont trop petits ou trop gros (ça dépend de l’année ou du courant culturel), si nous devrions nous efforcer de ressembler plus à telle actrice ou à telle autre ». Comme cet idéal de beauté qui leur est imposé, inatteignable, car toujours changeant, cela fait se demander quel critère n’a pas été respecté ici pour que les images de ces femmes photographes se retrouvent reléguées au sous-sol.

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Illustration : Souffrir pour être belle, sans date, Lise Nantel, tirée de l’Agenda 1978 / Notes sur l’histoire des femmes au Québec (préambule au mois de juin), publié aux Éditions du Remue-ménage.

Bonne nouvelle cependant : alors qu’un tel livre n’était malheureusement pas disponible lors de la magnifique rétrospective du travail de Claire Beaugrand-Champagne présentée (dans une des grandes salles à l’étage !) au Musée McCord en 2013-2014, une monographie intitulée Émouvantes vérités vient enfin d’être publiée… aux Éditions de l’Homme.

Claire Beaugrand-Champagne_Ethel Nelson, Montréal, 1974
Photo : Mme Ethel Nelson et son oiseau Peter, rue Prince-Arthur, Montréal, 1974, série Les personnes âgées, Claire Beaugrand-Champagne, source.