Dans un château

Lu : Je ne tiens qu’à un fil mais c’est un très bon fil de Sylvie Laliberté publié aux éditions Somme toute en 2015.

Tout en demi-teintes et en délicatesse, ce petit bijou de livre est à la fois grave et lumineux, touchant et souriant, autobiographique et universel. À l’image de ces soldats en plastique ratissant un décor hors d’échelle, Sylvie Laliberté laboure la vie, mais sur la pointe des pieds. Une humilité et un esprit vif qui font grand bien, comme le printemps.

En voici quatre savoureuses bouchées :

« La maîtresse d’école nous avait demandé ce qu’on voulait faire plus tard. J’étais allé devant la classe pour dire que je voulais être une danseuse espagnole. Pourquoi ? avait-t-elle demandé. Parce que c’est en Espagne et qu’il y a des châteaux. Et que d’aller lire dans un château me semblait un bon plan » (p. 38).

« C’est dans les livres que j’ai appris que je n’étais pas seule : j’étais avec moi » (p. 54).

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Photo : Qu’est-ce que l’esthétique ?, sans date, Sylvie Laliberté, p. 23.

« La maîtresse avait organisé un concours de textes libres. J’avais écrit à propos de l’importance des poignées de porte. La classe a voté pour mon texte qui était très libre. La maîtresse a décrété que cette composition ne pouvait pas gagner le premier prix parce qu’il était impossible que le sujet d’un texte soit les poignées de porte. Elle a plutôt choisi un texte sur le printemps. Cette fois-là, j’avais onze ans, et j’ai commencé à m’inquiéter à propos des idées. Celles qu’on avait le droit d’avoir, et les autres » (p. 55).

« Devenir qui on est n’est pas naturel. C’est un travail de tous les jours. Et si on ne le fait pas, ce travail, on risque de devenir le voisin. Il y a beaucoup de voisins » (p. 79).

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Photo : Sans titre et sans date, Sylvie Laliberté, p. 34.