Crédibilité

Assisté à : la conférence de la présidente de l’Ordre des architectes du Québec (OAQ), Nathalie Dion, en faveur de l’adoption par le gouvernement québécois d’une politique nationale de l’architecture, présentée à l’École d’architecture de l’Université Laval le 11 février 2016.

Comprenant qu’une telle initiative serait un travail de longue haleine, plusieurs voix dans l’audience ont demandé si une campagne publicitaire comme celles orchestrées par d’autres ordres professionnels ne serait pas un moyen plus efficace pour faire connaître le travail de l’architecte. L’idée est évidemment attrayante. Cependant, comment en 30 petites secondes combler le déficit de crédibilité dont souffre encore la profession et offrir une image plus nuancée que celle qui habite l’esprit de bien des gens ?

Pierre Thibault tente d’y répondre dans une série de sept épisodes présentés par la Fabrique culturelle. Appuyé par une photographie très soignée, ce portrait permet d’admirer plusieurs de ses réalisations et d’entrevoir son processus de création. La série ne se concentre en même temps que sur les aspects les plus flamboyants de son travail comme la rencontre avec un client/mécène passionné, la découverte d’un site naturel fabuleux, la proposition d’une première maquette/synthèse, et la déambulation dans le produit fini. Rien ou si peu à propos du fonctionnement de l’atelier, de la répartition des tâches ou de possibles frictions entre tous ces très jeunes collaborateurs, de la traduction d’un concept en détails de construction faciles à réaliser et durables, de toute la rugosité, mais aussi de toute la magie du chantier.

Dans un tout un autre registre, Laurence Castany présente, dans un ouvrage à la fois court et généreux qui comprend même des entrevues avec les ouvriers, le projet de conversion de l’ancienne usine de la Condition publique à Roubaix (publié en 2004 dans la collection « Histoire de construire » aux éditions Sujet Objet). Elle y explique la genèse d’un autre type de « fabrique culturelle », faisant la juste part entre toute la complexité du contexte et la délicate réponse développée par l’architecte Patrick Bouchain, en collaboration avec l’ensemble des intervenants.

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Photo : Persépolis, Iran, 1962, Lucien Hervé, source.

Bouchain est quelqu’un qui réfléchit et qui agit, et auquel il faudra revenir. Dans l’immédiat et en guise d’entrée en matière, il nous laisse quelques notes inspirantes tirées de ses carnets comme : « bien construire l’insignifiant : s’attacher à bien faire les choses qui semblent petites, médiocres, modestes ou banales » (p. 73), « être omniprésent sur le chantier : rester et travailler sur place pour accompagner, conduire et accepter les retournements de situation » (p. 27), ou encore simplement « dire bonjour » (p. 49). On se dit alors que c’est peut-être surtout là, dans chaque petit geste posé au quotidien, que l’architecte a  le plus chance de bâtir le dialogue, la confiance, le respect, et de faire la différence.