Lu : Irréductible vérité : les photographes militaires canadiens depuis 1885 par Peter Robertson publié par les Archives publiques du Canada et les Presses de l’Université Laval en 1973.
Vu : le documentaire Which Way Is The Front Line from Here ? The Life and Times of Tim Hetherington de l’écrivain et cinéaste américain Sebastian Junger (2013).
Hormis quelques exceptions lors de la Guerre de Sécession et, de ce côté-ci de la frontière, de rares clichés saisis par des amateurs parmi les officiers de l’armée britannique, Robertson explique que la photographie n’a réellement commencé a être utilisée à des fins stratégiques et de propagande qu’avec l’avènement de la Première Guerre mondiale. Et, apparemment, le Canada aurait alors été l’un des premiers belligérants à se doter d’un service photographique digne de ce nom.
Cent ans plus tard, Junger rend pour sa part hommage à son complice Tim Hetherington. Connu pour sa couverture exceptionnelle de la guerre civile au Libéria, pays où le photographe a vécu pendant plusieurs années une fois la paix revenue, ainsi que pour ses images saisissantes de la guerre en Afghanistan, depuis l’avant-poste Restrepo où il a séjourné pendant de longues périodes en 2007-2008, Hetherington est décédé en Lybie en 2011 après avoir été grièvement blessé par des éclats de mortier.
En comparant le travail des treize photographes rassemblés par Robertson avec celui de Hetherington, il est frappant de constater que si les contours des conflits varient suivant les époques et les contextes, le cœur de l’affaire semble étonnamment constant : chefs charismatiques…


Adieux déchirants…


Alternance entre de longues périodes d’attente et de préparation, et de courts moments d’une intensité extrême…


Soldats épuisés grappillant quelques précieuses minutes de sommeil…


Civils, combattants ou gardiens de la paix marqués à jamais parce qu’ils ont vu et vécu.


Les photographes rassemblées par Robertson semblent être tous rentrés indemnes. Par contre, malgré toute son expérience, Hetherington n’a pu éviter, malheureusement, de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment. Dans la fièvre qui accompagnait le printemps arabe, Junger raconte que les journalistes précédaient parfois les rebelles dans l’escalier, alors qu’ils prenaient d’assaut tel ou tel édifice.
Difficile de ne pas repenser au constat fait par Boogie, le photographe d’origine serbe qui apparaît dans le film Everybody Street, au sujet de son reportage au cœur des gangs de rue à New York, et de ce qui l’a convaincu d’y mettre fin : « The deeper you go, the better pictures you’ll take. And it becomes like the most important thing in your life, and it can ultimately fuck you up. You know, destroy your life, this is real. »