Lu : Berlin par Jason Lutes, publié chez Drawn & Quarterly en 2019; et relu : Berlin: Portrait d’une ville par Hans Christian Adams, publié chez Taschen en 2007.
Dans cette fresque colossale d’une infinie richesse, fruit de vingt années passées à la table à dessin, Jason Lutes raconte une époque mouvementée à travers de multiples personnages habitant la même ville.

Plus encore, il tente de saisir, comme dans la formidable exposition Berlin 1937: In the Shadow of Tomorrow, ces points de bascule trop souvent fuyants parce qu’inimaginables où les certitudes vacillent, où les fragiles acquis se dérobent, où tout glisse et où il devient impossible de se répéter : « Jusqu’ici tout va bien. »

En filigrane, les personnages de Lutes sont confrontés à la question du moment et de la manière de réagir aux événements, chacun en fonction de sa propre situation, mais aussi collectivement.

Comment éviter l’impensable, sans céder au cynisme et à la noirceur ?

Que faire lorsque le président des États-Unis bafoue tout ? Lorsque le premier ministre du Québec utilise le bâillon à répétition pour faire adopter des projets de loi ? Ou lorsqu’il accentue des clivages déjà profonds, en accusant les Mohawks d’être armés jusqu’aux dents, au lieu d’encourager la négociation ? Après toutes les rebuffades subies depuis le 16e siècle, les autochtones ont de bonnes raisons d’être contrariés et il est étonnant qu’ils se contentent de bloquer des voies ferrées. À quand un véritable effort de se mettre à la place de l’autre ? À quand une sincère volonté de trouver calmement des compromis ?

Grand merci à Nico+Meli pour cette magnifique BD à la fois grave et inspirante.