English version below:
Lu : Brassaï, Paris par Jean-Claude Gautrand publié en 2004 chez Taschen, et Lartigue ou le plaisir de la photographie par le Musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de Besançon publié en 2004 chez Somogy, Éditions d’art.
Brassaï (1899-1984) est le photographe des laissés-pour-compte, des « petits métiers », de la nuit, du désir et de ces étreintes qui semblent toujours un peu forcées. L’aisance du photographe à se fondre dans une variété de milieux et à s’approcher d’une vaste galerie de personnages, assurément colorés, force l’admiration. Pourtant, le texte qui accompagne les images est tellement élogieux qu’il en devient presque suspect. Gautrand ne parvient pas, en particulier, à départager le regard ethnographique et compatissant du photographe de celui du voyeur surexcité se faufilant dans les coulisses des Folies Bergère ou des maisons closes parisiennes. Grand art ou sensationnalisme sordide ? À moins que le génie de Brassaï ne se trouve ailleurs, dans les nombreux livres qu’il a écrits au sujet de l’élite artistique dont il faisait partie ?
Quant à Jacques Henri Lartigue (1894-1986), il commence la photographie dès 1900, encouragé par son père. Issu d’une famille aisée, il est fasciné par les automobiles, les avions, le sport et la vitesse, mais aussi par cette vie douce passée à peindre et à pique-niquer au bord de la plage.

Dans le texte précédant les photos, intitulé Les beaux jours ou la Vanité en photographie, Claire Stoullig semble reprocher à Lartigue ses origines bien nanties, le fait qu’il n’ait pas nécessairement cherché à témoigner (il ne se serait jamais considéré comme un photographe à part entière) et qu’il ait embrassé toute la beauté qui l’entoure, apparemment sans distinction (son œuvre compte plus de cent mille clichés). Pourtant, le regard de Lartigue se révèle toujours émerveillé, souriant et conscient de sa chance.
En fait, le plaisir de Lartigue s’avère tout aussi intense que celui de Brassaï. Il se décline simplement dans un tout autre registre.
English version:
Pleasure
Read: Brassaï, Paris by Jean-Claude Gautrand published in 2004 by Taschen, and Lartigue ou le plaisir de la photographie (Lartigue or the Pleasure of Photography) by the Musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de Besançon published in 2004 by Somogy, Éditions d’art.
Brassaï (1899-1984) is the photographer of those left behind, of the small hands, of the night, of desire and of those embraces appearing somewhat contrived. The facility with which the photographer is blending into a variety of crowds, and getting close to a vast array of characters, colorful for sure, is astounding. However, the essay accompanying the images is so flattering that it becomes almost suspicious. Gautrand is notably incapable of distinguishing the photographer’s ethnographic and compassionate viewpoint from the one of the overexcited voyeur sneaking backstage into the Folies Bergère or inside Parisian brothels. High art or sordid sensationalism? Unless Brassaï’s genius is to be found elsewhere, in the numerous books he wrote on the artistic elite of which he was part?
As for Jacques Henri Lartigue (1894-1986), he started photography as soon as 1900, encouraged by his father. Coming from a wealthy family, he was fascinated by cars, airplanes, sport and speed, but also by a leisurely life of painting and picnicking by the beach.

In her essay preceding the images, titled Les beaux jours ou la Vanité en photographie (Glorious Days or Vanity in Photography), Claire Stoullig seems to criticize Lartigue for his well-to-do origins, the fact that he did not necessarily tried to bear witness (he never considered himself to be a full-blown photographer), and that he embraced all the beauty around him, apparently without discrimination (his work is made of more than a hundred thousand images). However, Lartigue’s viewpoint always proves to be in awe, joyful and conscious of his good fortune.
In the end, Lartigue’s pleasure turns out to be just as intense as the one of Brassaï. It simply translates into a completely different language.