Nizhnii Novgorod

Lu : « Stalinist City Planning: Professionals, Performance and Power » par la chercheure britannique Heather D. DeHaan publié en 2013 aux University of Toronto Press.

Dans les années 1930, alors que Nizhnii Novgorod (aujourd’hui cinquième ville de Russie) s’industrialise et gagne rapidement sur les marécages bordant la croisée des rivières Oka et Volga, cet ouvrage décrit non pas ce qui fait l’originalité des différents plans élaborés par les urbanistes en vue d’ordonner ce développement effréné, mais bien comment ces professionnels tentent de proposer une vision à la fois novatrice, adaptée et structurante dans un contexte parsemé d’embûches.

En effet, le premier plan quinquennal vient d’être lancé, avec ses objectifs ambitieux, mais difficiles à atteindre tant les besoins sont énormes, la plupart des infrastructures restent encore à mettre en place, les matériaux de construction et la main-d’œuvre qualifiée se font rares, la crise du logement poussent les gens à investir les nouveaux immeubles collectifs en construction alors que le gros-œuvre est à peine érigé, les compositions plus classiques continuent de s’opposer au constructivisme et au modernisme puis la surveillance, la propagande, les dénonciations et les purges arbitraires tiennent tout le monde sur le qui-vive,

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Gravure : « Le kremlin de Nizhnii Novgorod », sans auteur, vers 1850, source.
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Peinture : « Nizhnii Novgorod », titre exact, auteur et date à retrouver.
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Photo : « General View Houses 4 to 6, Workers City – Autoplant », 1930, sans auteur, source.

L’histoire que raconte DeHaan se déroule dans un autre pays, une autre culture et à une autre époque. Pourtant, une fois passées quelques différences évidentes, que de similitudes avec la situation que l’on connait ici aujourd’hui: un pouvoir central qui tente d’imposer sa vision et ses méthodes, des ministères et des agences gouvernementales en quête d’autorité qui luttent les unes contre les autres, des chantiers colossaux coincés par des délais impossibles imposés par les politiciens, des professionnels consciencieux qui sont écartés par des arrivistes pressés d’être aux premières loges, un système parallèle de « bons » échanges entre différents acteurs de l’industrie de la construction, et des citoyens qui, se sentant peu écoutés, finissent par mettre du sable dans l’engrenage et exiger des consultations ou encore une enquête publique. Fascinant !